Gallipoli... partner se rebiffe
Mardi. Le petit déjeuner se prend au rez-de-chaussée, sur une grande table abritée par la terrasse du premier étage. Le propriétaire et une jeune femme - sa fille, peut-être ? - servent les boissons chaudes et discutent. Nous apprenons qu'il a la chance d'avoir quelques parcelles d'une variété d'oliviers résistants à la bactérie tueuse, mais qu'ils donnent une huile au goût différent - elle a beau s'appeler favolosa dans ma tête je me dis que ça ne doit pas être si fabuleux, sinon tout le monde les aurait déjà plantés, non ? Nous lui achetons une petite bouteille - car il ne lui reste plus que des mignonettes de 125 ml... presque rien.
Je lui dis qu'au sud ils ont de la chance - certes, ils ne sont pas développés industriellement comme le nord, et ils ne sont pas riches. Mais ils ont le temps et le soleil pour eux, en un mot, la vie... et qu'ils sont tous bien cons, les déprimés accros au boulot du nord, de ne pas voir que ce sont eux, les sudistes, qui sont dans le vrai. Le gars en a les larmes aux yeux - je ne sais pas si c'est parce qu'il est d'accord ou qu'au contraire il ne voit que ses difficultés financières et ne voit pas où je veux en venir. Parfois c'est si difficile de se comprendre...
Ce matin nous commençons par jouer les touristes à Gallipoli, la grande ville du coin. Les abords sont moches et industrieux, comme de bien entendu, mais nous arrivons à nous garer au plus près de la petite presqu'île qui abrite le centre ville historique - c'est l'avantage du hors saison. Nous partons découvrir à pied une nouvelle ville blanche entourée de mer, dont les ruelles semblent à la fois touristiques et bel et bien habitées.



Un chateau, des fortifications, une plage, un port avec des barques et des pêcheurs... Gallipoli a tout pour plaire. Elle ne manque même pas d'églises - quelle ville italienne pourrait bien manquer d'église ?... - ni de petits bijoux artistiques logés en façade ou cachés dans des cours...



Après avoir fait deux fois le tour de la ville et sillonné toutes ses rues, nous rejoignons Partner et avisons le plan : direction Piazza Tellini, à quelques minutes à pied dans la ville moderne, où se trouve une autre fontaine d'eau de source « vivi l'acqua ». Nous y croisons deux vieux en train de remplir leurs bouteilles en verre, bien contents eux aussi de profiter d'une eau de qualité qui ne soit ni chère, ni plastifiée. L'écologie commence par des services simples...
Nous reprenons la voiture et faisons le plein dans une petite ville une fois sortis de Galatone - le détail a son importance. Car nous partons vers Matera, mais via Lecce vu qu'aucune voie rapide ne passe plus près de la côte. Sauf qu'au niveau de Lecce, une alerte UREA s'affiche sur le tableau de bord de partner. Il ne manquait plus que ça ! Antoine consulte la doc, et la première chose évidente à faire semble de tenter un plein d'adBlue - bien que la voiture ait fait l'objet d'une révision il y a moins de 3 mois. À la station suivante, nous demandons le plein... le pompiste vient avec un bidon de 20 litres à 20 euros, mais... bien sûr, n'arrive qu'à en verser à peine 5 litres. Beau joueur, il ne nous fait payer que 5 euros. Cependant le problème reste à priori entier, mais ne soyons pas défaitistes... Nous continuons à rouler avec l'alerte, car selon le mode d'emploi, il faut rouler 50 km pour vérifier si elle persiste ou disparaît. Nous sommes au niveau de Mesage quand elle devient « problème moteur - la voiture ne démarera plus dans 1100 km »... Splendide ! Il nous faut maintenant trouver un garage Peugeot. Après vérification sur maps, le garage le plus proche est à Brindisi. Nous venons de la dépasser il y a moins de 10 km : demi-tour !... Nous trouvons le garage sans trop de difficultés, mais c'est la pause déjeuner : il rouvrira à 15h30. Nous garons partner plus loin, et prenons nous aussi notre pause du côté du port, avec petite balade digestive près du Monumento al Marinaio d'Italia. 15h30 pétantes, nous débarquons au garage. Un petit homme trappu pas bien aimable se propose de jeter un oeil, et nous manoeuvrons pour approcher la voiture dans une petite venelle adjacente. Il y jette à peine un oeil, et décide qu'il ne pourra pas l'examiner avant jeudi - soit il a effectivement beaucoup de travail, soit il n'a pas envie de se plier en quatre pour des clients étrangers. À ma demande, il confirme qu'on peut de toutes façons rouler encore : 1100 km c'est marqué après tout, non ? Un peu rognons, nous reprenons la voiture et la route. Le décompte s'enclenche, et tous les 50 km, le kilométrage annoncé fond comme neige au soleil - et le soleil, dans le sud, il tape fort. Entre temps, nous avons évidemment simplifié l'itinéraire et visé directement notre destination finale : pas question de faire de détours. Nous arrivons à Matera vers 17h30 et allons directement voir le garage Peugeot local. Masque sur le nez, nous expliquons notre petit problème d'urée au responsable. Ce garage est visiblement très occupé - il tourne à plein régime, des voitures entrent et sortent en permanence - mais après avoir un peu patienté, un employé récupère partner. Nous avons l'impression qu'il le traite comme s'il était pestiféré : spray désinfectant dans l'habitacle, coup de chiffon avec détergent sur les poignées, le volant, et en touche finale l'indispensable protège-siège de tout garage qui se respecte. Après avoir laissé retombé les particules de désinfectant, un autre employé vient connecter la valise. Le verdict ne met pas longtemps à tomber, nous sommes invités dans le bureau du chef pour l'écouter : la pompe urée est défectueuse. Une « petite » réparation de près de 1000 euros... car la pompe ne vient pas sans le réservoir, c'est tout le bloc qu'il faut changer. D'autant qu'il a regardé : la pièce n'est disponible nulle part en Italie, il faut la faire venir de Vesoul... et pour cela compter une semaine de délai. Il nous explique que malgré tout la voiture fonctionne très bien sans, elle polluera juste un peu plus - il suffirait de réinitialiser le compteur pour continuer nos vacances sans s'en soucier trop. Comme nous ne restons pas longtemps à Matera, il nous propose de repasser avant notre départ pour remettre le compteur à zéro (« azerato »)... trop sympa. Sur ces bonnes nouvelles, nous nous rendons directement à la Masseria Santa Lucia al Bradano, une masseria a priori historique, avec une frande cour pavée ceinte de grands murs. Le propriétaire nous attend de pied ferme : nous sommes ses seuls clients ce soir. Il n'est pas de très bonne humeur, prend notre température (c'est la mesure anti-COVID numéro un en Basilicate apparemment) et nous laisse rapidement seuls... Il nous enferme dans le domaine et se barre ! Il nous a attribué la chambre pour handicapés - les portes sont larges, le lavabo un peu trop bas, par contre la douche... est italienne et neuve : enfin une douche qui fonctionne ! En contrepartie, aucune fenêtre dans la pièce, et une odeur de tabagie assez insupportable. Nous dînons dehors dans la cour déserte mais illuminée, dans un décor assez féérique il faut bien le dire.










Avec le soleil qui décline, je tente ma chance pour une baignade en soirée à Porto Badisco, espérant que la foule se sera éclaircie... mais ce n'est absolument pas le cas : décidément, les plagistes sont particulièrement endurants en Italie ! Demi-tour, nous passerons donc la soirée à la Masseria. Après un dîner sur notre terrasse, nous descendons pour profiter du wifi de l'hôtel : il faut dire que nous ne savons toujours pas où nous dormirons le lendemain. Et que cette incertitude jour après jour commence à nous miner un peu : cela prend du temps de chercher la bonne adresse au bon prix... Nous sommes un peu tendus, mais parvenons finalement à trouver notre prochaine étape. Après plusieurs journées plutôt dédiées au tourisme « à pied », demain sera consacré au touring en Partner. Objectif : le bout du sud !































