C'est en discutant sur Whatsapp avec notre ami hôtelier (en général, on parle essentiellement de sites internet - oui, je sais...) qu'il fini par me fournir une information décisive pour la soirée : son frère joue ce soir à Fassa. En Play Off de série A ! En d'autres termes, dans une équipe qui correspond beaucoup plus à son niveau.
C'est une information qu'on attendait, alors il va sans dire que nous n'hésitons pas : nous décidons de chambouler nos plans (c'est-à-dire ne pas faire de feu dans le salon en prévision d'une soirée pantoufles) pour aller le voir jouer, même si c'est à une bonne heure de route. Heureusement, c'est une heure de route facile, nous l'avons déjà parcourue la semaine dernière pour aller voir à quoi ressemble la série A.
Bien emmitouflés - j'avais eu sacrément froid la dernière fois ! -, nous partons hyper à l'heure et tout sourire : exceptionnellement, le lecteur de CD de schénic est coopératif et accepte de lire Bring on the Night de Sting ! Nous avalons les premiers kilomètres tout en discutant, et aux alentours d'Alleghe, j'envisage même un arrêt à l'hôtel du copain, quand la vue du panneau des "Viabilita Passi" me fait froid dans le dos.
Je lève le pied et m'arrête à la station service toute proche. "Le Passo Fedaia est fermé ! On fait comment ?!..." On avait oublié un détail : la neige était à nouveau tombée cette nuit en quantité, et habituellement dans ces cas-là, le Fedaia est fermé pour risque d'avalanches. Oups. C'est le cas.
Option un : on fait demi-tour et on attaque le San Pellegrino : au moins 1h30 de route. Option deux : on continue, on passe par Arraba, le passo Pordoi, et on descend sur Canazei : au moins... euh, je sais pas... Waze, tu sais dire combien ? 1h15 ? Adjugé !
Maintenant que c'est décidé, il ne reste plus qu'à rouler : il est 20h, le match commence dans une heure, et on sait qu'on est déjà en retard - il ne reste plus qu'à savoir de combien ! Car les autres cols sont annoncés ouverts, mais avec la mention "chaînes obligatoires"... ce qui laisse présager du pire pour l'état de la chaussée !
Je dépasse Caprile, arrive à l'intersection, et là, en moins de 5 minutes, on arrive déjà sur une partie très mal déneigée, à vrai dire, on voit beaucoup plus de neige que de goudron... après cette petite route secondaire, je rejoins enfin la route principale en balcon : son état n'est pas meilleur, c'est même pire... entièrement recouverte de neige tassée, par -5°C. Pas grand monde sur le route, ça va sans dire. A Arraba, on commence à s'interroger... est-ce bien raisonnable ?!
Allez, on continue ! Le Passo Pordoi est marqué "ouvert", c'est presque rassurant, alors c'est le moment de se prouver qu'on sait rouler sur des pentes de 15% recouvertes de 5 cm de neige tassée !!! Pour l'instant la montée ne me fait pas peur, car il faut bien dire que les pneus neige, c'est une tuerie : pour peu qu'on ne dépasse pas les 30 km/h, schénic a une adhérence de fou - sauf sur les plaques de verglas, j'avoue, il y en a une qui nous a fait un petit battement au coeur, ensuite j'ai repéré et évité sagement toutes les autres. La seule chose que je redoute en montée, c'est le ralenti : si schénic s'arrête, elle ne repartira pas sans qu'on lui mette les chaînes (or maintenant qu'il fait -8°C dehors, j'aimerais autant éviter). Heureusement, on ne croise qu'un seul véhicule en descente, et j'ai toute la route pour moi !
Voilà, nous sommes en haut... il ne reste plus qu'à redescendre ! Là, je fais encore plus attention : pas envie de descendre en glissades, alors dans les épingles je me limite à du 20 km/h, en mode hyper prudent. Dix virages plus bas (le col en compte une trentaine), je vois la lumière de phares : comme c'est un virage en intérieur que je m'apprête à prendre, je freine au max en prévision de notre croisement, car cette fois-ci je vais devoir garder ma droite. Et là, une voiture de kéké blanche avec aileron arrière surgit à pleine vitesse, virage en dérapage, arrive en plein sur ma voie et s'arrête à 2 cm du nez de schénic !...
Assez près pour qu'on distingue clairement la tête du conducteur ahurit de croiser quelqu'un sur son circuit perso façon Tropée Andros... non mais je rêve ! Heureusement, j'ai pilé à temps, heureusement, il a vachement bien maîtrisé son bolide. Il recule, je lui fais un petit merci de la main (littéralement, "merci connard d'avoir évité de défoncer schésché alors que tu joues avec la vie d'autrui"), et je repars. Là, c'est sûr, on a gagné l'immunité pour la soirée, limite on pourrait rouler deux fois plus vite, c'est sûr il ne peut plus rien nous arriver !... Bon, on reste prûdents quand même, c'est plus sûr.
21h15, soit dans un temps exactement conforme aux prévisions, nous entrons dans la patinoire de Canazei : le premier tiers temps est commencé depuis 8 minutes, le tableau des scores marque 0-1, on n'a presque rien râté - c'est tout à fait décent. On s'installe, on regarde du côté des joueurs... tu le vois, toi ? Manquerait plus qu'on se soit déplacé pour rien ?! Ah si, regarde, il est là !
Voilà, s'en suit une bonne partie de hockey : du vin chaud, exceptionnellement aussi du thé pour ne pas trop picoler (il faut penser au retour !), des fautes imaginaires siflées par les arbitres (ce soir, essentiellement en faveur de Fassa), d'autres complètement ignorées, un public qui insulte les arbitres (Truco!...), des buts, du suspense... le premier tiers-temps se conclue à 1-2, à la reprise Vipiteno marque un but de plus, puis il ne se passe plus rien de tout le second tiers-temps : côté Fassa, l'entraîneur fait jouer exclusivement les deux premières équipes qui pourtant n'ont pas de solution à proposer, pendant que les autres joueurs font banquette... Au troisième tiers-temps, Fassa marque enfin et recolle au score, 2-3, redonnant un second souffle à l'équipe : on voit enfin jouer Manuel plus souvent, et même, associé avec de meilleurs joueurs... il faut bien avouer qu'il a la classe et du panache sur la glace ! On est fans. A quelques minutes de la fin, Fassa égalise, puis prend la tête sur le score final du match : 4-3, bien aidés par l'arbitre vous diront certains...
Voilà, il est 23h30 et il ne reste plus qu'à rentrer. Cette fois-ci, nous descendons tout le val di Fassa, extrêmement bien déneigé et sans prequ'aucune circulation, un vrai billard, et attaquons le San Pellegrino, lui aussi très roulable, même si la neige est bien présente sur les hauteurs. Au passage de Falcade, le plus dur est fait, il est déjà 00h30, et... ah, banco, contrôle de police. Il ne manquait plus que ça !
Les Carabinieri, ce ne sont pas mes préférés, ils sont courtois, certes, mais pendant que l'un trifouille mes papiers pendant bien 10 minutes à l'arrière de leur voiture (s'il interroge un réseau pour faire je ne sais quel contrôle, au vu de la 3G locale, je comprends que ça prenne une plombe...), l'autre fait le planton à côté de nous avec sa carabine. C'est pas amical.
Voilà, on nous rend nos "documenti", et c'est reparti, on va enfin pouvoir se mettre au chaud sous notre plus grosse couette, et avec bonus bouillotte pour moi - il va bien falloir ça pour me réchauffer après cette soirée givrée !